lundi 23 janvier 2017

SuperMoi contre LeCrabe [B9] - version définitive

Nuit noire, pluie légère. Une rue mal éclairée. Une portière qui s’ouvre puis un homme qui sort de la voiture. Il avance de quelques mètres et se retourne pour admirer sa belle berline. Il respire la fierté dans son costume gris de cadre dynamique. Il marche sous la pluie, peinant à éviter les flaques ; pas encore assez dynamique pour pouvoir se payer une place de parking.

Sous les lampadaires fatiguées, sa silhouette longe un terrain en démolition. En arrière plan, deux sans-abris se tiennent autour d'un baril rouge. Ils tentent en vain de se réchauffer mais aucune flamme, aucune chaleur ne semble vouloir les y aider.

L'homme s'approche en sortant une petite bouteille en verre de sa poche. Il tend la main vers le premier sans abri qui le regarde ahuri. Le bras à l'horizontale, les doigts écartés, il ferme les yeux, semble se concentrer. Un éclair jaune jaillit de la poitrine du vieil homme en direction de la main grande ouverte. L’énergie du désespoir se concentre entre ses doigts, jusqu'à devenir une petite boule jaune qui illumine la scène sous les yeux terrifiés des deux hommes restés immobiles.
Il la serre, la presse, l'écrase et son jus coule dans la bouteille.

Il lève à nouveau son bras et le dirige en direction du second sans-abri. Un rayon rouge part de sa tête pour rejoindre la main de l’homme en costume qui jure sur ce décor de pierres et de poussière. Une bonne dose de lassitude, la boule se forme entre ses doigts en quelques secondes.
Il la serre, la presse, l'écrase et son jus coule dans la bouteille.
Il met le doigt sur le goulot, secoue vigoureusement le mélange et jette la bouteille dans le baril. De belles et grandes flammes oranges apparaissent et éclairent tout le terrain vague. Les deux sans-abris se regardent, observent l’homme qui s’éloigne, hésitent quelques instants puis se tournent vers le baril en tendant les mains.

SuperMoi arrive chez lui, ouvre la porte, pose ses clés dans la petite coupelle blanche de l’entrée, enlève ses chaussures, embrasse sa femme et ses enfants. Son fils joue à se cacher derrière les rideaux. Sa fille finit ses devoirs sur la table de la cuisine à côté de sa femme qui prépare le repas.

Après le dîner, le rituel du coucher des enfants : lavage de dents puis une histoire sur le lit.
SuperMoi descend les escaliers, débarrasse la table puis rentre dans sa chambre. En bas de son dressing, derrière ses chaussures, un carton. Il l’ouvre. Assis en tailleur, il contemple une multitude de petites bouteilles en verre. Il en saisit une, referme le carton et monte sans bruit à l’étage des enfants.

Il en sort une minute plus tard avec deux boules dans les mains, une verte et une bleue.
Il les serre, les presse, les écrase et leur jus coule dans la bouteille.
SuperMoi met le mélange dans sa poche, embrasse sa femme, mets ses chaussures, attrape ses clés dans la petite coupelle blanche de l’entrée et quitte la maison.

Une grande avenue, une homme qui marche d’un pas assuré avant de s’arrêter au pied d’un immeuble.
SuperMoi rentre dans le hall, attend l’ascenseur en panne puis prend les escaliers. Il tape à une porte. Un homme fatigué lui ouvre en souriant.
Un appartement, décoré avec goût. Un repas à peine entamé sur la table et un tas de médicaments sur la cheminée. L’homme lui tend une lettre. SuperMoi se mord la lèvre en regardant l’homme esquisser un sourire triste.

SuperMoi lève le bras à l’horizontale, ouvre grand la main, les doigts écartés vers l’homme qui tremble de tout son corps. Une lueur noire jaillit du malade qui garde les yeux fermés. SuperMoi se concentre, son bras semble attiré vers le sol mais il tient bon et parvient à le maintenir droit devant lui. La lueur devient un brouillard qui s’épaissit, en se rapprochant de la main de SuperMoi, puis disparaît pour donner place à un portail dont surgit un crabe de la taille d’un homme.

LeCrabe fait claquer ses pinces et bondit en direction de SuperMoi qui l’évite d’un pas de côté. LeCrabe s’écroule sur la table qui se brise sous son poids. SuperMoi profite de la situation, le maintient à terre et enchaîne les coups de poings. LeCrabe éjecte SuperMoi d’un puissant coup de pince contre la bibliothèque dont les étagères s’écroulent sous le choc. LeCrabe semble incontrôlable, il enchaîne les coups que SuperMoi esquive les uns après les autres. Un puissant coup de pince manque de justesse SuperMoi et vient se planter en travers du frigo. SuperMoi en profite pour étrangler LeCrabe. Après de longues secondes de suffoquement, SuperMoi sort la petite bouteille de sa poche et lui écrase sur la tête. Le mélange se répand sur le visage du crabe qui crie de douleur. Il retire sa pince du frigo et éjecte SuperMoi d’un coup d’épaule en le regardant  d’un air de défi, d’un air qui veut dire : je reviendrai. LeCrabe court à travers la pièce, brise  la baie vitrée d’un coup de pince et disparaît dans la nuit.



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